16 février 2007

Leçon de conduite : Fuego on ice ou le feu sur la glace.

Sur ce blogue, je ne vous ai pas souvent parlé de mécanique ou de technique parce que ça m’ennuie autant que vous. Mais pour le bien des nouveaux camionneurs qui traverseront leur première saison froide, comme Denis, Nathalie, Sylvain et peut-être aussi un peu pour vous en tant qu’automobilistes, j’ai bien humblement élaboré une liste de conseils pour conduire et freiner sur une chaussée glissante.

Lorsque je suis sortie de l’école de conduite, je me suis rendu compte que je n’avais pas appris de techniques pour ces conditions difficiles. On nous répétait toujours de ne pas prendre le chemin dans ces conditions, mais dans la réalité, la route ne vous appelle pas pour vous dire « je suis glacée » et vous vous retrouvez pris sur le fait à mille lieues de chez vous dans des terres hostiles où il n’y a pas d’endroit pour stationner votre quadruple éléphant en patin parce que tout le monde veut s’arrêter en même temps. Alors, autant savoir quoi faire sur la glace quand elle tombe sur votre route.


Voici quelques conseils appris de sueur et d’instinct au cours des 7 hivers traversés en camion.


D’abord, déboulonnons le mythe des accidents de poids lourds mis en porte-feuille : c’est rarement la remorque qui dérape, mais le tracteur sur lequel vous avez un contrôle. Quand la traction est perdue sous les roues arrière du tracteur, celui-ci est poussé par la force de l’inertie de la remorque qui le pousse pour le faire plier vers elle. Ça ne vous arrivera jamais si vous savez doser les accélérations et les décélérations. Écoutez toujours ce qui se passe sous vos roues.

La prévention en six étapes :


1. Vitesse : Réduisez votre vitesse selon les conditions.
2. Régulateur de vitesse : Ne roulez jamais avec le régulateur de vitesse en marche, sauf quelques instants pour vous reposer la jambe (10 heures sans régulateur de vitesse, ça crispe le corps).
3. RPM : Tenez toujours la révolution du moteur à moins de 1500 tours par minute. Plus le moteur tourne vite, plus vous risquez de déraper. Ne faites jamais compresser le moteur. (À plus petite échelle, c’est le même principe en voiture qu’il ne faut jamais faire compresser sur la glace).
4. Distance : Garder une distance 10 fois plus grande qu’en temps normal. Éviter de suivre les autres sur lesquels vous n’avez pas de contrôle, les longues files de camions sont à éviter. Soit vous les dépassez, soit vous restez loin derrière. Roulez de préférence seul, méfiez-vous de vos compagnons de radio et concentrez-vous sur votre chemin. Éviter les bans de camions, ils se suivent souvent de trop près augmentant le danger en cas de freinage. Voyagez solo ou avec un copain qui vous suit de très très loin. (Des dizaines de fois, j’ai vu deux camions de la même compagnie se rentrer dedans parce qu’ils se suivaient de trop près).
5. Méfiance : méfiez-vous des automobilistes qui tentent de vous dépasser, surtout les camionnettes (pickup) qui sont plus faciles à faire déraper. Ceux qui dépassent ne sont pas toujours conscients de la glace et en cas de dérapage, ils pourraient enfiler sous votre remorque et être anéantis. Méfiez-vous de tous les trains routiers américains qui n’ont qu’un seul essieu de traction (les Conways, Fedex, UPS, Roadways, Yellow, etc.), ils restent pris partout, allant même jusqu’à bloquer les autoroutes parce qu’ils sont incapables de monter une minuscule pente
6. Conscience : Soyez toujours conscients de qui se trouve autour de votre poids lourd en roulant en balayant vos 6 rétroviseurs toutes les 10-15 secondes. En cas de manœuvre d’urgence, vous saurez quelle voie prendre en ne quittant pas la route des yeux et vous épargnerez de précieuses secondes.

Avec une distance de dix longueurs de camion devant vous, freiner d’urgence ne devrait jamais vous arriver. Malgré toutes ces précautions, il se pourrait que vous ayez à freiner en état de panique sur la glace quelques fois en carrière. Si ça vous arrive plus de 3 ou 4 fois, il faut revoir votre façon de conduire et appliquer les règles de préventions. Mais encore faut-il savoir comment réagir dans cette situation fâcheuse.

Pour ralentir d’urgence sur chaussée glacée :

1. Utilisez le frein moteur avec parcimonie : réglez-le d’avance pour ne pas ralentir trop vite et déraper (en général sur la glace, réglez-le sur 2 cylindres au lieu des 6), faites des tests quand vous êtes seul. Vous devez être capable de trouver le bouton du frein moteur dans le noir et sans regarder, pratiquez-vous avant de partir ou quand la route est belle, vous devez être capable de le faire en une fraction de seconde sans quitter la route des yeux.

2. Méfiez-vous des freins ABS. Si votre remorque n’en est pas munie, ils sont inutiles, même avec un camion de l’année. On dit qu’avec des ABS, il faut freiner très fort et qu’ils feront le travail à votre place. Personnellement, je n’ai pas encore constaté leur efficacité. Peut-être le seront-ils dans quelques années quand tous les équipements désuets auront été remplacés. Toujours est-il que ça ne sera pas le moment de pratiquer en cas d’urgence, mieux vaut savoir comment se comporte votre camion en testant les ABS avec votre remorque en freinant brusquement dans un stationnement glacé par exemple.

3. La base du freinage sur glace sans ABS : Freinez en donnant des dizaines de coups assez forts (selon l’urgence), mais bien dosés en ajustant selon le comportement de votre tracteur. Gardez toujours un œil sur l’agissement de la remorque dans vos rétroviseurs tout en gardant un œil sur l’obstacle devant. Si vous voyez la remorque louvoyer, c’est probablement une illusion d’optique et votre tracteur qui freine trop par rapport à votre remorque. En relâchant, ça devrait se stabiliser.

4. En cas de fatalité : trouvez une porte de sortie d’urgence en changeant de voie ou en trouvant le décor le plus amortissant possible comme dans la neige folle plutôt que de heurter une voiture et risquer de tuer ses occupants.

La transmission automatique pourra vous sauver quelques mètres en cas de freinage d’urgence sur la glace (et dans toute autre situation de freinage.) Elle rétrogradera comme une championne sans que vous ayez à relâcher le frein pour rétrograder (contrairement aux transmissions manuelles). Vous pourrez aussi employer le frein moteur sur 2 ou 4 cylindres (sur les 6, ça serait beaucoup trop fort). Occupez-vous de freiner tel qu’énoncé dans la base du freinage en sentant l’adhérence sous vos roues de tractions. Si vous sentez une perte d’adhérence, relâchez le frein immédiatement et reprenez-le en une fraction de seconde et répétez des dizaines de fois successivement.

Si votre camion est muni d’une transmission manuelle :
· Laissez faire les changements de vitesse, vous n’aurez pas le temps! En effet, en cas d’urgence, il ne sera pas le moment de lâcher le frein, double débrayer en donnant un coup d’accélération comme il se doit pour rétrograder, vous perdriez de précieux mètres. Dès que le moteur atteindra 600 tours, vous devrez prendre la pédale de débrayage pour mettre le moteur au neutre (sinon tout risque d’arracher sous le camion) et freiner par petits coups successifs, comme expliqué précédemment. Vous ne pourrez avoir l’aide de votre frein moteur, étant donné qu’il sera inopérant dès que vous aurez tout mis au neutre avec la pédale, contrairement à la transmission manuelle.

· Gardez en tête que le moteur doit toujours tourner à moins de 1500 tours. Donc, rétrogradez à moins de 1100 pour embrayer à 1500 ou moins. Sinon, quand la vitesse embarquera à plus de 1600 tours, le risque de déraper est très grand et peut être fatal. La compression du moteur sur la glace pourrait être irrécupérable sur une chaussée glissante. Ne rétrogradez jamais deux vitesses pour compresser sauf si vous le faites à 600 tours, ce qui dans ce cas, ne fera pas compresser votre moteur. Si vous le faites, votre tracteur pourrait se mettre à patiner, alors, mettez tout au neutre avec votre pédale de débrayage en contrôlant avec votre volant.

Soyez prudents automobilistes comme camionneurs et surtout bonne route!

11 commentaires:

Anonyme a dit...

Merci, Sandra, pour ces nombreuses et belles leçons de conduite sur neige et glace!... Même que certaines d'entre elles pourraient être très utiles aux automobilistes que nous sommes.

En résumé, pour tout le monde: toujours être en mode de conduite préventive; conduire avec sa tête plutôt qu'avec ses pieds; penser que son véhicule peut devenir une arme mortelle et même une arme de destruction massive!...

Lorsque je travaillais chez Greyhound (1967 à 1976), surtout lorsque les conditions n'étaient pas favorables, on ne nous poussait pas dans le dos afin d'arriver à temps coûte que coûte, dans le seul but de respecter l'horaire écrit sur la cédule de la compagnie. On nous disait qu'on aimait mieux nous voir arriver à destination en retard mais avec tous nos morceaux et tous nos passagers (qui pouvaient être jusqu'à 40, 45, 50! Ce n'est pas rien, ça!...). D'ailleurs, j'y pensais très souvent à toutes ces personnes installées derrière moi et qui abandonnaient en toute confiance leur vie entre mes mains... Et je dois avouer aussi que je réalisais pleinement que j'étais le tout premier qui risquait de se cogner le nez lors d'un impact; ils n'en ont pas de nez justement, ces autobus et autocars!... :-))

Prudence en tout temps, en tout lieu!...

Anonyme a dit...

Sandra,

Comme Jean le dit si bien, plusieurs de ces techniques vallent aussi pour l'automobile.

Par contre, contrairement à Jean, je pense qu'il vaut tout de même mieux de conduire avec ses pieds en se servant de sa tête que de conduire avec sa tête, comme il le suggère. En effet, si l'on conduit avec sa tête, on ne verra plus rien, ce qui handicape fortement notre capacité de conduire de façon sécuritaire... Non ?

En tout cas, c'est mon opinion et je la respecte !

Bonne route et/ou bon retour, mais :

Bonne fin de semaine,

André.

Anonyme a dit...

Bonjour,
Comme le dis si bien notre ami Jean ,si on roule avec notre tête et avec modération peut importe qu'on arrive en retard c'est quand même mieux d'arriver avec une cargaison complète qu'en morceaux, de plus ca sauve beaucoup de vie. On ne peut s'immaginer l'arme qu'on tiens entre nos mains , ca pardonne pas un camion et il est rare que ca ne cause pas de dégats.On n'as pas de vie humaine derrière mais on risque d'en rafler quelques unes si on prend le champ.
Un gros merci a sadra qui nous conseil c'est si précieux de plus que Denis et moi avons eu nos cours en été l'école n'as pas voulu nous faire de la neige artificiel alors on est un peut dépourvu d'expérience glaciale :)
Bonne route a mes amis et S.V.P soyez prudent , je vous aimes beaucoup mieux en vie .

Anonyme a dit...

Merci, André, pour le bon conseil! À partir de maintenant, je vais conduire avec mes pieds... en me servant de ma tête, bien évidemment!... Mais, contrairement à plusieurs autres, je vais aussi ajouter mes mains... Ce sera moins risqué ainsi!... Tu vois, même après bientôt 44 ans de conduite exemplaire, il n'est jamais trop tard pour changer et bien faire!... Autre chose: même si je conduis avec mes pieds, je vais tout de même tenter de ne pas conduire... comme un pied!... ;-))

Anonyme a dit...

Vu et noté....reste maintenant à prier, en espérant que tout ira bien... Moi je suis pas pressé, la cash... bof ca vaut pas la peine et la compagnie pour laquel je travaille valorise la sécurité avant tout, donc si je peux pas arreter sécuritairement, je prendrai ca mollo mollo...j'aurai de la misere à vivre avec l'image d'un quatre pattes se faisant anéantir sous ma remorque...

Merci pour tes conseils de petite soeur....

tub a dit...

pour les nouveaux chauffeur la premiere hivers est la plus difficile mais la deuxieme est la plus dangereuse puisque la pluspart vont avoir pris de l'Experience et de la confiance et ses la que les accident arrive malheureusement

mais peut importe le nombre d'anner d'experience on se fait toute peur 1 fois ou deux par hiver lolll

Anonyme a dit...

Merci Jean,

Les mains, j'avais complètement oublié.

Voilà, selon moi, une preuve irréfragable que, un fois rendu sur un site, il faut lire TOUS les commentaires.

André.

Sylvain Larin a dit...

Merci Sandra pour tous ces trucs. C'est mon premier hivers et je trouve ça assez stressant merci.

Il y a un point que tu n'as pas abordé et qui me stresse beaucoup. Comment aborder une courbe glacée/enneigée dans une pente descendante? Je sais que je dois anticiper le virage et diminuer ma vitesse avant d'entrer dans la courbe, mais tu ne peux pas toujours voir quelle distance a la courbe et ajuster ta vitesse en conséquence.

Si je me rapelle bien, il est suggéré de garder la tire durant la courbe. Comment dois-je réagir si je me rend compte que je n'ai pas suffisamment ralenti avant la courbe? Est-ce que je lâche simplement l'accélérateur ou je peux appliquer légèrement les freins?

Bruno Racette a dit...

Une autre chose à retenir surtout pour les nouveaux qui se sentent obligé de prouvé quelque chose : Quand ça roule pu on tire le Jaune aucun voyage,rendez-vous, ou dispatch ne vaut une visite dans le clos!

Tu te sens pas «safe» ?

Accoste le navire ;-)

Au plaisir

camionneuse a dit...

Sylvain,

En hiver, quand c'est glacé ou que tu doutes de l'adhérance, tu ne gardes JAMAIS la tire.

Bonne route

Anonyme a dit...

Fuego on Ice.
Heureusement que tu le maîtrises bien en respectant les leçons de conduite car je n'aimerais pas trop le voir faire un double salto arrière !!;-)